La notion de complément

Publié le par oceaniadis

Une phrase peut fonctionner (être grammaticalement correcte) tout en étant réduite à la forme la plus simple : par exemple un SN très réduit et un SV également très simple.Ex. : "L'homme arrive". Il s'agit là d'une "phrase minimale".
Mais on peut également compléter cette phrase minimale, c'est-à-dire lui adjoindre des compléments, qui sont alors des compléments de nom ; on obtient alors par exemple : "l'homme de San Francisco", "l'homme brun", "l'homme qui était déjà venu ce matin" des compléments de verbe ; on obtient : "arrive en train dans la soirée", "arrive demain", "arrive bientôt", "arrive avec précaution" (ou "précautionneusement" : ce qui permet de voir le lien de telles structures avec ce que l'on appelle les "adverbes") ou encore des compléments de phrase ; on obtient alors : "Comme il l'avait annoncé, l'homme arrive", "L'homme arrive dès qu'il aura fini son travail", "Tous les samedis matin l'homme arrive dès huit heures pour vérifier les horaires de train".
Cette définition très large du "complément" n'est pas du tout contradictoire avec la définition grammaticale traditionnelle (= "s'ajoute au verbe pour en compléter le sens"), mais l'élargit à tous les membres de la phrase et à la phrase elle-même.
Notons qu'on parle également dans les grammaires de "complément de nom", ou de "complément de phrase", mais qu'en raison de la présentation qui en est faite, les élèves et les étudiants ne voient pas toujours que la fonction de ces compléments est de compléter le nom (en ce sens les "adjectifs" sont des compléments, au même titre que les structures toujours cités avec "de" : "rouge" dans le livre rouge" complète autant le nom livre que "de Pierre" dans "le livre de Pierre"
Dans un texte très stimulant J. Gardes-Tamine et M.A Pelizza rapprochent ce phénomène que nous appelons ici "complémentation" de l'"amplification" [terme utilisé en rhétorique], qui peut être décrite comme un phénomène qui à partir d'une proposition noyau "charge" progressivement cette forme de base pour constituer l'unité textuelle réelle. La phrase-noyau ou la proposition-noyau est bâtie autour d'un verbe qui en est l'élément central : Ce verbe, en fonction de son lexique, appelle un certain nombre d'unités, qui lui sont indispensables sur le plan syntaxique comme sur le plan sémantique. C'est ce que l'on appelle la valence du verbe. (
J. Gardes-Tamine et M.A. Pelizza, 1998, p. 12).
On notera que ces compléments, quels qu'ils soient, épithètes, compléments circonstanciels, etc. jouent un rôle sémantique identique : ils servent à expliciter à travers le contexte linguistique (Molinié dans sa définition de
l'amplification évoque bien ce qu'il appelle la "spécification") ce qui pourrait, dans d'autres circonstances, être laissé à l'implicite de la situation. On peut choisir de dire "Ce garçon m'embête", "Ce grand garçon m'embête", "Ce grand garçon m'embête tous les jours dans la cour de récréation, "Ce grand garçon de 4eB m'embête tous les jours dans la cour de récréation, lorsque nous sortons de la musique", etc.
Les auteurs d'oeuvres littéraires ont parfois cultivé un style dépouillé en essayant d'écrire uniquement (ou presque uniquement : car il est très difficile d'écrire longuement ainsi) avec des propositions noyaux, en évitant au maximum l'amplification. On donnera quelques exemples :
"Les pleurs la réveillent. Elle vous regarde. Elle regarde la chambre. Et de nouveau elle vous regarde. Elle caresse votre main." (Marguerite Duras, La maladie de la mort)
En ce qui concerne la construction d'un texte, la distinction entre proposition noyau et éléments d'amplification (compléments divers) ne suffit pas pour expliquer tous les faits. On devrait parler aussi du traitement de l'information en examinant la question de la focalisation et de l'emphase, mais également celle des modalités, suivant en cela J. Gardes-Tamine et M.A. Pelizza (
ouvrage cité, pp. 22-26.)

Divers types de "compléments"

Les compléments comme éléments qui complètent la phrase-noyau, qui explicitent la situation dans le discours, la transformant en contexte, peuvent être de divers types, peuvent concerner aussi bien le SN que le SV ou que la phrase elle-même.
Ainsi les principaux "compléments de nom" sont (ici soulignés dans les syntagmes nominaux)
-les "adjectifs" divers : "cet homme blond...", "une affaire ennuyeuse", "l'arrivée impromptue de Pierre...", parmi lesquels il faudrait inclure le "substantif épithète" selon l'expression retenue par Michèle Noailly: "une lessive miracle", "une robe Dior", etc. : ces éléments sont en fait des "compléments directs" du Nom, par opposition aux éléments de la 3e catégorie qui sont des "compléments indirects".
-les groupes relatifs : "cet homme que j'avais connu il y a six ans...", "une affaire qui me contrarie beaucoup", "l'arrivée de Pierre que je n'avais pas prévue..."
-les groupes prépositionnels (compléments indirects du Nom) : "une tasse à café, "une affaire en or", "l'arrivée impromptue de Pierre..."

Publié dans Français

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